Devenir ingénieur avec un bac pro ou techno, c’est possible !
Est-il possible de devenir ingénieur si l’on possède un bac techno ou un bac pro ? Oui, les bacheliers généraux n’ont pas le monopole des écoles d’ingénieurs après le lycée, même s’ils y sont encore majoritaires.
Dans un article du 27 février 2024, le Nouvel Obs donnait l’exemple d’une lycéenne issue d’une terminale technologique STI2D (sciences et technologies de l’industrie et du développement durable) qui avait intégré, avec presque 20 de moyenne, une prépa TSI (technologie et sciences industrielles) avant d’intégrer ensuite une « classique » CPGE (classe préparatoire aux grandes écoles), l’une des meilleures à Lyon, avec des bacheliers généraux. La prépa TSI, vous connaissez ? Peut-être pas… Elle reste peu connue parce qu’elle est réservée aux bacheliers STI2D et STL (sciences et technologies de laboratoire) et parce que les bacs techno restent associés aux études courtes par beaucoup. C’est pourtant l’une des trois voies d’accès possibles aux écoles d’ingénieurs offertes à des profils de type bacheliers techno et bacheliers pro : soit après une prépa (la voie la plus « classique »), soit juste après le bac dans une école qui mène au diplôme d’ingénieur en 5 ans (dite avec « prépa intégrée »), soit par ce que l’on appelle une voie d’admission parallèle, après un bac+2, +3 ou +4.
Premier « chemin » : par la prépa
1- Des places réservées aux concours
Certaines écoles dédient des places à ces profils au concours. Ainsi, le concours Geipi Polytech, un concours commun d’entrée dans 35 écoles d’ingénieurs publiques post-bac en France, propose quelques places aux élèves issus de la série STL, spécialité sciences physiques et chimiques en laboratoire. Les candidats retenus sur dossier sont convoqués à un entretien de motivation. Ils peuvent intégrer Polytech Grenoble ou Polytech Marseille afin de suivre des études d’ingénieur dans le domaine de la chimie. Autre exemple, le concours Advance propose quelques places dans l’école privée d’ingénieurs en biotechnologies Sup’Biotech. Tous les candidats sont convoqués aux épreuves orales.
Les places sont rares pour les bacheliers STAV (sciences et technologies de l’agronomie et du vivant) en école d’ingénieurs, mais le concours Puissance Alpha (ESA) et la procédure France Agro 3 sont également accessibles à ces bacheliers.
2- Des prépas spécifiques
Il existe par ailleurs des classes préparatoires spécifiques aux bacheliers technologiques et professionnels, qui conduisent vers un grand nombre de grandes écoles, y compris les plus prestigieuses : elles permettent, soit de préparer les concours (puis école en 3 ans), soit l’accès à une école avec prépa intégrée (5 ans).
> La prépa TSI (technologie et sciences industrielles) : proposée dans 42 lycées, elle s’adresse aux bacheliers STI2D, quelle que soit leur spécialité, ainsi qu’aux bacheliers STL spécialité SPCL (sciences physiques et chimiques en laboratoire). Elle prépare aux concours d’entrée et aux admissions sur titre de nombreuses écoles d’ingénieurs. Cette prépa, qui se déroule en 2 ans privilégie l’apprentissage par la pratique (la moitié des enseignements se présente sous forme de TD ou de TP en demi-groupe) et en 1re année, un accompagnement personnalisé de 3h est prévu pour permettre aux élèves d’intégrer les nouvelles exigences et méthodes de travail. Des bacheliers professionnels issus des sections industrielles et présentant un bon dossier ont aussi « leurs » TSI, pour eux en 3 ans, dans les lycées Monge de Chambéry, Henri Parriat de Monceau-les-Mines et dans l’Institut privé Emmanuel d’Alzon de Nîmes.
Les élèves de prépa TSI ont accès à plusieurs concours communs ou banques de notes et se voient attribuer un quota de places à l’entrée des écoles : concours commun INP, concours Centrale-Supélec, concours CESI École d’ingénieurs, concours EPITA-IPSA-ESME, Groupe INSA… soit au final plus de 80 écoles d’ingénieurs accessibles.
> Les CPES (classes préparatoires aux études supérieures) permettent, en 1 ou 2 ans, à des élèves titulaires d’un bac technologique et professionnel, de se préparer à l’entrée en CPGE (classe préparatoire aux grandes écoles) ou à des études dans l’enseignement supérieur. Ces années « sas » consistent en une remise à niveau intensive pour apprendre les méthodes de travail en prépa et commencer à se préparer aux exigences spécifiques des différents examens d’entrée dans les grandes écoles. Les CPES en 1 an visent en priorité une entrée en CPGE afin de réussir ensuite les concours des grandes écoles. Outre apporter de solides apports scientifiques et de culture générale (avec 19 heures de sciences et 11 heures de lettres et de langues vivantes chaque semaine), elles forment à des méthodes de travail adaptées, entraînent aux oraux des concours (2h par semaine), offrent un accompagnement personnalisé par des enseignants et un tutorat par des élèves ingénieurs. Ce à quoi s’ajoute un accompagnement à l’orientation (visite d’écoles d’ingénieurs, conférences par des chercheurs, visite d’entreprises, rencontre avec des jeunes ingénieurs…). Les CPES 2 ans visent, en priorité, l’entrée directe et sans concours dans les écoles d’ingénieurs partenaires de ces CPES.
Deuxième « chemin » : juste après le bac, dans une école avec « prépa intégrée »
Beaucoup d’écoles d’ingénieurs post-bac, donc en 5 ans, accueillent aussi un petit nombre de bacheliers STI2D, STL et STAV, ainsi que des bacheliers généraux n’ayant pas suivi uniquement des spécialités scientifiques. La sélection (concours, entretiens, examen de dossier) y est autant de mise que dans les écoles après prépas. Même s’il est réputé moins stressant que la classe prépa, ce parcours demande toutefois de fournir un travail régulier pendant les 2 premières années, souvent les plus déstabilisantes.
C’est d’ailleurs pour cela que certains établissements proposent un accompagnement spécifique (cours de soutien, tutorat par des étudiants ou des enseignants) les premières années de la formation d’ingénieur. C’est le cas par exemple des deux INSA de Toulouse et Lyon. Une fois intégrés dans la filière dénommée FAS pour Formation active en sciences à Toulouse et INS’AVENIR à Lyon, les étudiants bénéficient d’une pédagogie adaptée à leur profil. À Toulouse, ces étudiants sont reçus individuellement entre la rentrée de septembre et les vacances d’automne. Est ensuite défini un programme de rendez-vous et d’aménagements en fonction des besoins, en se saisissant des dispositifs existants : le dispositif Réussite pour régler des problèmes méthodologiques, le tutorat intergénérationnel pour les remises à niveau, assuré par les étudiants de 2e et 3e années passées avant eux dans cette filière, la cellule médico-sociale pour des problématiques relevant de cette dernière, etc. Et si ces étudiants rejoignent en 3e année les étudiants issus des filières générales, ici on continue de les suivre durant les 5 années s’ils en ont besoin !
Cette voie d’accès n’est pas à négliger pour plusieurs raisons : notamment parce que l’accueil n’est pas « portion congrue » – ouverte en 2007, la filière de l’INSA Toulouse a doublé ses effectifs en 2018, en les faisant passer à 48 par promo -, et la réussite est au rendez-vous (selon la responsable de la FAS, 75 % des entrants de la filière sont diplômés ensuite de l’INSA Toulouse).
Ce sont ceux qui y sont passés qui en parlent le mieux…Diplômé de l’INSA Toulouse en génie mécanique en 2016, Aurélien Genet reconnaît volontiers avoir bénéficié d’« une transition plus douce et [d’]un accompagnement vers un diplôme généraliste qui n’aurait pas forcément été envisagé via un parcours classique ». « Le fait de faire partie d’un groupe réduit et issu de la même formation apporte une stabilité qui dans un premier temps permet de se sentir plus à l’aise avant l’adaptation progressive au système d’apprentissage commun », explique-t-il. « La proximité avec les enseignants que permet le travail en groupe par rapport aux cours magistraux est un privilège qui apporte aux élèves issus de la filière technologique le confort nécessaire pour s’adapter à la charge de travail demandée. » Fabrice Roucolle, titulaire d’un bac pro et diplômé en 2021 en génie mécanique estime de son côté que « cette filière [lui] a réellement ouvert les portes des études supérieures et d’un monde professionnel qu[’il] ne pensai[t] pas pouvoir atteindre ». Pour lui, nul doute que « sans cette filière », qui « accompagne au plus proche les élèves, de façon presque individuelle »,il « ne serai[t] pas un ingénieur aujourd’hui »… |
Troisième chemin : en admission parallèle
Enfin, les grandes écoles proposent des modes d’admission sur titre ou en admissions parallèles : une entrée est aussi possible pour des candidats issus de l’université, de filière bac+2 ou bac+3 (licence STS – Science technologie santé, BUT, BTS à caractère scientifique ou technique…).
De nombreuses écoles sont réunies au sein de concours communs pour sélectionner leurs candidats par la voie des admissions sur titre : admission par voie universitaire-GEI-UNIV, Advance Parallèle, Avenir+, banque DUT-BTS, CASTing, Concours ATS, concours agronomiques voie B, voie C, voie C2, apprentissage, concours commun INSA, concours ENI, concours réseau Polytech, concours Mines-Télécom en AST, Pass’Ingénieur, Sélection UT. Sachez que les critères d’admission via cette voie restent quand même stricts : renseignez-vous bien avant de postuler et préparez-vous également de manière minutieuse aux épreuves (tests d’aptitudes, examens oraux, tests d’anglais…).
Il est aussi possible de rejoindre une école d’ingénieurs en choisissant une formation de bachelor (trois années d’études après le bac). Enfin, l’alternance est aussi une bonne option pour entrer en école après un « détour » en IUT ou BTS.
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