Armand Batlle, ailier du CO : la tête, les jambes et le cœur !
Sacré champion de France de rugby 2018 en juin dernier, le Castres Olympique a déjoué tous les pronostics en réalisant une fin de saison exceptionnelle. Parmi les joueurs qui se sont illustrés, Armand Batlle, ailier de choc et serial marqueur du club tarnais. Vivre au Lycée est allé à sa rencontre.
En quelques mots, quel est votre parcours scolaire ?
J’ai décroché un bac ES en 2005 au lycée Arago de Perpignan. Après, j’ai suivi une licence STAPS à Font-Romeu, que j’ai obtenue en 2008. Puis, tout au long de mon parcours de joueur, j’ai suivi des formations dans les clubs où je suis passé ou avec le syndicat des joueurs de rugby, Provale : en création et gestion d’entreprise, en anglais, et j’ai aussi fait des bilans de compétences. Je viens de commencer une formation de kinésithérapeute depuis cette rentrée. C’est quelque chose que je voulais faire depuis que je suis pro, mais ça n’a pas pu se faire à l’époque où je jouais à l’USAP (Union sportive Arlequins perpignanais), car ce n’était pas possible d’aménager les cours en fonction de mes obligations de joueur. J’ai régulièrement présenté des dossiers dans des écoles de kiné par la suite, et j’ai rencontré le même problème… Jusqu’à cette année ! Je peux aujourd’hui suivre des cours aménagés pour sportif de haut niveau. L’objectif est d’anticiper ma reconversion. Je vais suivre 4 ans de cours aménagés puis, une fois terminée ma carrière de joueur, deux ans en formation classique.Au lycée, quel genre d’élève étiez-vous ?
Sérieux et dans la moyenne. Ni le meilleur, ni un cancre. Plutôt discret et calme.Quand vous étiez ado…
… J’étais à fond sur le rugby ! J’habitais à Rivesaltes, à côté de Perpignan, à 10 mètres du stade où l’USAP s’entraînait. Mon adolescence, c’est le rugby et les amis d’enfance que je m’y suis fait pour la vie. L’école, c’était plutôt un passage obligé, où je n’ai pas forcément beaucoup de souvenirs. Avec les filles, j’étais très timide, et plutôt introverti en général. Peut-être que le rugby m’a permis de me dévoiler un peu en grandissant.Avez-vous rencontré des difficultés dans votre parcours scolaire, par exemple en termes d’orientation ?
J’ai connu un coup dur en 3e. J’étais passionné par le rugby et je voulais intégrer le pôle Espoirs de l’AS Béziers. L’objectif était clairement de suivre un parcours pour devenir pro. J’ai passé les tests mais je n’ai pas été pris. Sur le moment, ça a cassé mon rêve. J’ai donc poursuivi ma scolarité par trois ans au lycée. Et finalement, j’ai pu intégrer le pôle de formation des espoirs de l’USAP. Mais avant d’y arriver, je me suis vraiment accroché aux études, avec un objectif : passer le bac. Après, j’ai donc suivi une licence de STAPS, avec l’idée que si je ne devenais pas joueur de rugby professionnel, je m’orienterais vers la préparation physique ou professeur d’APA (activités physiques adaptées), car j’avais déjà travaillé avec des personnes handicapées.En quoi a consisté votre travail avec ces personnes?
Les APA, cela consiste à faire faire du sport aux personnes handicapées physique ou mentale. J’ai fais des stages avec des non-voyants et des paraplégiques et tétraplégiques.Vous avez joué avec les Barbarians… Est-ce que dans un coin de votre tête vous pensez à l’équipe de France ?
Quand on joue pour les Barbarians, qui devenue l’équipe de France B, on ne peut pas s’empêcher d’y penser, on se dit « pourquoi pas ? » ! Mais c’est difficile, surtout à un poste où il y a beaucoup de jeunes joueurs talentueux. Le plus dur pour intégrer l’équipe de France, ce n’est pas seulement de réussir une belle saison, mais de la confirmer et de jouer régulièrement à ce niveau.« Si tu veux obtenir ce que tu veux, il ne faut pas lâcher »
Quels conseils donneriez-vous à des ados qui voudraient se lancer dans le sport de haut niveau en général, et le rugby en particulier ?
C’est un chemin semé d’embuches, très concurrentiel, avec peu d’élus à la fin. Ma devise, c’est « travailler paie toujours ». Il ne faut jamais lâcher ni se démoraliser. Comme dans la vie, il y a des hauts et des bas. Si tu veux obtenir ce que tu veux, il ne faut pas lâcher. Et parfois quand tu t’y attends le moins, tu récupère le fruit de ton travail. Il faut donc être régulier dans le travail, et il y a des sacrifices à faire. Par exemple, j’ai bien profité de ma jeunesse, mais en y allant calmement sur les sorties. Quand mes copains sortaient tous les week-ends, moi c’était une fois sur trois. Et puis je n’ai jamais fumé, et je suis très sobre : juste quelques bières de temps en temps pour fêter la victoire.Avez-vous des passions qui n’ont rien à voir avec votre métier mais que vous cultivez par pur plaisir ?
J’ai essayé de m’intéresser à pas mal de choses : golf, cinéma, littérature… J’ai même pris des cours de guitare. Mais j’ai peu accroché à tout ça. Le rugby est vraiment mon unique passion.A l’issue de votre carrière de joueur, quels sont vos projets ?
Devenir kinésithérapeute. Je vais probablement me spécialiser. Je ne sais pas encore dans quelle pratique, mais ça sera proche du sport.Qu’est-ce que vous lisez ?
Beaucoup de livres en rapport avec le sport, notamment des biographies ou des autobiographies de grands entraîneurs ou de grands sportifs. Je pense en particulier à celle de l’entraîneur de handball Claude Onesta, qui a tout gagné. Elle est intéressante dans son approche de la compétition et surtout par rapport à l’enchaînement des titres qu’il a remporté. En lisant ces autobiographies en parallèle avec ma carrière, je vois ce que j’ai fait par rapport à eux, et ça me donne des idées pour aller chercher le maximum.Votre dernière lecture marquante, mais plutôt en roman ?
Je suis Pilgrim, de Terry Hayes. C’est un thriller sur fond de terrorisme bactériologique. Un ancien agent secret lutte contre un terroriste qui veut introduire un virus mortel aux Etats-Unis. Cela fait réfléchir car malheureusement c’est un sujet très actuel, même si dans une petite ville comme Castres, on est plutôt à l’abri !« Je suis très années 80 »
Et côté musique, qu’est-ce que vous écoutez ?
De la chanson française ! La disparition de Charles Aznavour m’a vraiment touché. Celle de Johnny Hallyday cet été aussi. Je suis très années 80. Dans les vestiaires, on a des jeunes joueurs de 20 ans qui n’écoutent pas du tout ça, et passent plutôt du rap. Mais il faut être ouvert à tout…Quel est votre dernier coup de cœur musical ?
Kid, de Eddy de Pretto.Un conseil qu’on vous a donné un jour et que vous avez souvent à l’esprit dans les moments difficiles ?
On nous a toujours rabâchés, à mon frère, mes sœurs et moi, que le travail paie. On n’a rien sans rien. Si quand je m’entraîne, je ne me mets pas dans le rouge, alors je ne récolterais pas de bons résultats lors du match. C’est pareil pour les études. Propos recueillis par Fabien Cluzel.« Baïle », pas « Batteul » !
Armand Batlle est catalan et fier de ses origines. Il a d’ailleurs arboré le drapeau sang et or à l’issue de la finale du Top 14. Et en pays catalan – autour de Perpignan et dans les Pyrénées-Orientales, – son nom se prononce « Baïle », et pas « Batteul » comme à l’anglaise. « Quand j’étais petit, je ne comprenais pas forcément quand mon père corrigeait ceux qui prononçaient mal notre nom. Mais il nous disait, et il a raison, que si on n’insiste pas sur la bonne prononciation, alors elle se perdra pour toujours. »Armand en chiffres et en dates
31 ans1,88 mètre, 91 kilos
3 frères et sœurs
Joueur pro dans le Top 14 depuis 2009 avec Perpignan
Champion de France 2018 avec le Castres Olympique
Meilleur marqueur d’essais du Castres Olympique en 2017-2018