Bien faire ses vœux sur Parcoursup : les conseils d’expert d’Élisabeth Elkrief
Depuis le 20 janvier, les élèves de terminale doivent déposer leurs vœux sur la plateforme Parcoursup. La multitude de formations, de métiers, et les incertitudes sur les envies, peuvent créer de l’anxiété chez de nombreux lycéens. S’appuyant sur un guide numérique qui détaille la démarche à suivre, Élisabeth Elkrief, directrice générale de la fondation AlphaOmega, livre ses conseils pour aborder sereinement cette étape cruciale de l’orientation.
Vivre au Lycée : Comment doit-on aborder la démarche de choix des vœux quand on est lycéen ?
Élisabeth Elkrief : On doit d’abord se dire qu’elle se prépare, mais simplement. Les élèves ont raison de s’inquiéter, mais pas parce qu’ils pensent que Parcoursup est sélectif, parce que l’orientation est une étape très importante. Un défaut d’orientation peut mener au décrochage. C’est d’ailleurs pour cette raison que la Fondation AlphaOmega, qui accompagne les associations qui œuvrent en direction des élèves modestes, a élaboré un guide qui décompose le parcours à suivre et cible des outils et ressources pertinentes pour ce faire. Les choix d’orientation seront l’aboutissement d’une démarche.
Comment les élèves doivent-il procéder ?
Il y a 5 étapes à suivre :
1/ D’abord se connaître. Qui est-on ? Plutôt créatif ? Dans le contrôle ? Quelles intelligences j’ai parmi les intelligences multiples, etc. ?
2/ Évaluer son potentiel (les notes) et découvrir les études qui correspondent à sa personnalité.
3/ Découvrir les métiers qui correspondent à ces études.
4/ Se renseigner. Les études visées et les organismes de formation sont-ils bien reconnus par les métiers que l’on vise ? Et il faut parler à des étudiants pour connaître leur quotidien et à des professionnels pour connaître la teneur des métiers.
5/ Trouver l’établissement de formation qui correspond à mes attentes.
« Pour bien s’orienter il faut croiser les notions de vouloir et pouvoir »
Pourquoi est-ce important de suivre ce cheminement ?
Pour bien s’orienter, cibler les études, il faut d’abord croiser les notions de vouloir et pouvoir : savoir ce que l’on aime et ce que l’on veut, mais aussi connaître son potentiel (notamment les notes obtenues au lycée). Des tests vont pouvoir nous donner des pistes d’études et nous faire découvrir aussi des métiers auxquels on n’aurait même pas pensé ! Aujourd’hui, les jeunes de l’OCDE connaissent 10 métiers en moyenne, dont plus de la moitié ne sont déjà plus porteurs. On fait ce qu’a fait Papa, Maman, son oncle… Or, à côté, il existe des sites qui référencent 6 800 vidéos métiers : le monde est vaste !
Quand on a croisé les envies et son potentiel, on peut commencer à investiguer progressivement sur les trois autres étapes. C’est important car on a parfois une idée fausse des formations. Par exemple, psychologie est une filière en tension car elle est très demandée. Mais beaucoup d’étudiants abandonnent en cours de cursus. Car ce sont des études très théoriques, où l’on fait beaucoup de statistiques et où finalement la teneur des soins est une partie assez peu abordée de manière pratique avant la 4e ou la 5e année. Il faut parler avec un professionnel d’un métier que l’on vise pour lui demander quelles sont les formations qui mènent ce métier, et ensuite « reboucler » avec un étudiant. Si vous les réalisez bien, ces quatre étapes sont extrêmement enrichissantes.
Enfin, quand vous avez réussi à dégager 4 ou 5 métiers qui vous plaisent, il faut repérer les écoles et les universités qui vous y forment, vérifier les classements, si les diplômes sont reconnus par l’État, si c’est privé, donc si c’est cher, se demander si on veut faire des études studieuses ou si on a besoin de pragmatisme, et dans ce cas voir s’il existe des filières en apprentissage. Sachant que choisir des filières en apprentissage permet de faire 10 vœux supplémentaires, donc de doubler ses chances. Et on peut rappeler le professionnel avec qui on a discuté pour vérifier avec lui si la filière convient pour faire son métier.
Pas si simple pour un lycéen d’aller interroger des professionnels et des étudiants, ni de s’y retrouver dans la pléthore d’informations que l’on peut trouver sur le net. Quels conseils donneriez-vous sur ce point ?
C’est en découvrant qu’il y avait pléthore de sites, des bons et des mauvais, que l’on a décidé de faire ce guide. Nous nous sommes dit « les pauvres jeunes, c’est anxiogène ! ». Dans ce guide, nous avons listé des ressources que nous avons analysées et qui nous semblent pertinentes. Et nous donnons accès directement à celles-ci sans que l’élève n’ait à chercher la bonne page sur les sites dans lesquels elles sont hébergées.
Pour la première étape, Futurness et Pixis proposent de très bons tests. Pour la 2e, Inspire de l’association Article 1 est un bon outil pour découvrir le type d’études adapté à votre façon de travailler : vous remplissez un questionnaire sur ce que vous aimez, ce que vous faites, vos notes… L’application vous sort une dizaine de fiches très concrètes, avec des informations sur les campus, ce qu’on y fait, et vous donne la possibilité d’être mis en relation avec un étudiant éclaireur. L’Onisep propose également un Quiz Quels métiers pour moi, et je pense aussi au test Imagine ton futur
Pour l’étape 3, identifier les métiers qui collent avec ses centres d’intérêt, il y a notamment Jobirl, un site très user friendly, qui, sur la base de 25 questions sur vos préférences, vos actions (aimez-vous créer, intervenir…. ?), sort des listes de filières. Des sites comme Oriane.info ou Studyrama offrent le même type de service. Pour l’étape 4, qui consiste à s’informer, rencontrer, connaître les tendances, le guide renvoie aussi sur des sites comme Jobirl, Parcours métiers qui propose 6 800 vidéos métiers, Wilbi pour s’abonner à des stories, Myjobglasses pour contacter des professionnels en filtrant, Inspire pour contacter un étudiant éclaireur, Study Advisor, Pôle Emploi, etc. Notre guide est accessible gratuitement, c’est important. Évitez les ressources payantes car elles vont vous renvoyer vers du privé.
« Chaque vie, chaque personne est différente. Il faut vérifier que ce qui nous donne envie nous correspond »
Les salons et forums ont-ils aussi un intérêt ?
Oui, bien sûr, car on y fait des rencontres humaines. Ces personnes pourront aussi vous donner des idées de métiers. Mais attention : quand on écoute quelqu’un vous raconter son métier, on peut avoir la tête dans les étoiles. Chaque vie, chaque personne est différente. Il faut vérifier que ce qui nous donne envie nous correspond.
Comment bien remplir le Projet de formation motivé sur Parcoursup ?
Il faut que cette lettre de motivation montre que les études ciblées correspondent au métier envisagé, que les notes montrent un potentiel pour les suivre et son intérêt pour ces études. Ce sont toutes ces étapes préalables qui vont permettre d’expliquer « pourquoi » ce choix dans le PFM justement. « Voilà qui je suis, je suis créatif, j’œuvre dans une association… Voilà pourquoi ces matières m’intéressent. Pourquoi cette école ? Car j’ai parlé à des professionnels, des étudiants qui m’ont dit qu’elle préparait bien, dans un environnement bienveillant… » Et le recruteur saura que le candidat s’est renseigné.
« À CV égal, la rubrique »Activités et centres d’intérêt » peut faire la différence »
Ça peut paraître long, toutes ces étapes à franchir…
Les élèves ont deux mois pour faire toutes les étapes. Ce qui est important, c’est de les planifier. On se donne une semaine pour se connaître progressivement ; la 2e semaine, on va découvrir des pistes d’études sur Inspire, et chaque jour on peut en explorer une en lisant des fiches, en visionnant des vidéos, en parlant à son professeur principal, avec un étudiant éclaireur ; ensuite on fait de même pour la découverte des métiers, etc.
Progressivement, cela va devenir du plaisir car cela prendra une forme concrète. Et on reste serein car on découvre aussi d’autres pistes en cheminant. Il faut se donner la date du 15 mars pour inscrire ses vœux sur la plateforme pour ne pas se stresser. C’est une étape importante de sa vie, on va se poser réellement la question « qui est-on, que veut-on ? », et qu’il faut voir comme une chance : avant, il n’y avait aucun outil pour découvrir ce que l’on ne connaissait pas et on s’orientait forcément sur ce que l’on connaissait.
Même si c’est facultatif, il est conseillé aux élèves de remplir la rubrique « Activités et centres d’intérêt », pourquoi ?
Cette partie d’un CV [Parcoursup a supprimé le CV mais gardé cette rubrique] permet de présenter qui vous êtes vraiment. À CV égal, celle-ci peut faire la différence. Il ne faut mettre que ce que vous aimez faire, par exemple du foot, ce qui montre que vous aimez faire du sport en équipe. Et n’omettez pas des choses qui peuvent vous sembler personnelles : elles peuvent révéler votre esprit caritatif (l’associatif par exemple), votre ouverture (vous avez voyagé…), et refléter votre personnalité (vous avez des activités où vous êtes engagé, vous travaillez les langues sur votre temps libre).
Vous mettez ainsi qui vous êtes sur la table sans vous contenter de présenter votre profil scolaire. C’est important, parce que cela montre des soft skills [aptitudes non scolaires liées à la personnalité]qui sont aussi attendues. Et c’est se donner le plus de chances possibles d’obtenir des réponses positives.
Parcoursup intègre aussi un onglet « Ma préférence » à remplir au cas où le candidat n’aurait eu aucune réponse positive. Ça n’est pas toujours facile pour un lycéen de savoir ce qu’il préfère… Comment répondre à cette partie ?
Ce n’est pas évident, c’est sûr. Mais sur toutes les pistes qui émergeront à l’issue de cette démarche, va se jouer sur l’une d’elle une affaire émotionnelle : on va s’y voir ! À critères équivalents, il faut écouter son cœur. Et pourquoi pas mettre cette préférence même si du point de vue des notes l’élève peut être « juste ». Si ce vœu lui tient à cœur, cela pourra jouer sur la décision du recruteur : il pourra se dire « il le veut vraiment, donnons-lui sa chance ». À niveau égal, entre quelqu’un qui dit que c’est sa passion et quelqu’un qui dit « pourquoi pas ? », il préfèrera retenir celui qui en rêve.
Propos recueillis par Camille Pons