L’éducation à la vie affective et sexuelle entre dans le programme
Le Conseil supérieur des programmes (CSP) a publié sa proposition de programme pour une « éducation à la vie affective, relationnelle et à la sexualité », dont une partie concerne le lycée.
Approuvée par la ministre de l’Éducation nationale, cette éducation sera « obligatoire » et devra donc être effective dès la rentrée prochaine dans tous les établissements, publics et privés sous contrat, dans l’ensemble des classes de lycée général, technologique et professionnel.
Annoncé le 20 janvier dernier par le Premier ministre Gabriel Attal, ce programme, qui concernera tous les élèves du primaire au lycée, a été officiellement présenté ce mois de mars à la ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, Nicole Belloubet, qui l’a approuvé. De la seconde à la terminale, il a été conçu pour s’adapter à « l’évolution physiologique et psychologique des élèves » et pour aborder les comportements, de l’individuel au collectif, « du Moi au groupe, du groupe à la Cité ». Le programme sera effectif dès la rentrée prochaine.
En classe de seconde devront être explorées les tensions entre l’intime et le social ; en première, ce seront les conduites, les tentations, les plaisirs et les risques qui seront abordées avec les élèves ; et pour finir, en classe de terminale, l’approche visera à permettre à l’élève « de vivre sa sexualité en jeune adulte responsable, respectueux de sa propre liberté comme de celle des autres ».
Les thématiques du programme par niveau
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Des activités proposées par plusieurs profs, ou des profs et des intervenants professionnels
Dans ce programme sont proposées des activités pour aborder chaque question. Même si ces propositions ne sont pas « rigides », donc laissées au choix des enseignants, les séances devront être nécessairement proposées dans un cadre mêlant plusieurs disciplines, donc systématiquement animées par un duo de professeurs de champs disciplinaires distincts ou encore par un duo associant un professeur d’une matière ou un documentaliste et un intervenant qui occupe d’autres responsabilités professionnelles (un membre du personnel du pôle santé-social, un conseiller principal d’éducation, un intervenant extérieur du domaine de la médecine, de la justice, etc.).
Voici quelques exemples de ce qui pourra vous être proposé :
> En classe de seconde, sur la thématique « L’image du corps et le souci de soi »
🤔 De quoi il s’agit ?
→ Connaître les différences biologiques entre femme et homme : les appareils génitaux féminin et masculin sont comparables (clitoris homologue du pénis par la présence de tissu érectile générateur de plaisir ; ovaire et testicule producteurs de cellules reproductrices) ; la distinction biologique entre homme et femme ne détermine pas les expressions, les comportements et les rôles qualifiés de « masculins » et de « féminins » ; il y a des articulations entre nature et culture (anthropologie, sociologie, philosophie).
→ Comprendre notamment que la construction de son image corporelle et le souci de soi sont influencés par des facteurs sociaux et familiaux : compliments, fréquentation d’images artistiques, stéréotypes et préjugés, consommation d’images érotiques ou pornographiques, violences sexuelles, etc.
🧐 Comment l’aborder ?
Avec, par exemple, une co-animation français, EPS, enseignement du numérique ou de la technologie (avec le professeur documentaliste, EMI, SNT, technologie, selon le lycée)
Montrer, à travers des études de cas, que l’idéal du corps invite à des comportements de sculpture de soi :
→ Les pratiques sportives, la musculation, etc. ;
→ Les conduites alimentaires (des régimes aux troubles de la santé) ;
→ La retouche des photographies et la chirurgie esthétique ;
→ La recherche de la performance (entre réalisation de soi et évolutions pathologiques).
> En classe de première, sur la thématique « Se connaître, vivre et grandir avec son corps »
🤔 De quoi il s’agit ?
→ Analyser comment la notion de fête met en jeu le plaisir, la mesure et l’excès : l’usage de substances psychotropes modifie le raisonnement et augmente le risque de prise de décision inappropriée y compris en matière de sexualité ; la fête expose à des risques de rapports sexuels non protégés (IST, grossesse non désirée) ; le groupe exerce une pression (comment être dans ce groupe sans céder à cette pression).
→ Réfléchir aux enjeux de la modération.
🧐 Comment l’aborder ?
Avec, par exemple, une co-animation biologie (SVT ou BPH ou PSE selon le lycée), EMC, langues vivantes, français, philosophie, avec l’infirmière scolaire, avec le professeur documentaliste.
→ À partir d’une scène de fête dans une œuvre cinématographique ou littéraire, ou de scènes de pression de groupe, ou encore de campagnes de prévention : analyser les réactions des personnages après la prise de substances psychotropes ; étudier les textes de loi en matière de consommation de ces substances ; dégager les lignes d’une conduite responsable.
→ Quelles conduites à adopter afin de prévenir les risques d’infection sexuellement transmissible (IST) ou de grossesse non désirée ?
> En classe de première, sur la thématique « Rencontrer les autres et construire des relations, s’y épanouir », sur la question du consentement
🤔 De quoi il s’agit ?
→ Apprendre à exprimer ses envies, ses besoins et ses limites en matière de sexualité, dans le respect de soi, de l’autre et de la loi : comment ne pas subir une relation non désirée, savoir donner vraiment ou refuser son accord ; connaître les conditions du consentement (ou du non-consentement) et mesurer les risques encourus en cas de non-respect.
🧐 Comment l’aborder ?
Avec, par exemple, une co-animation EMC, philosophie, STSS, économie-droit, avec le CPE, avec l’assistante sociale, en partenariat avec les forces de l’ordre ou la justice.
→ Au travers d’exemples ou de scènes de films ou théâtre : différencier consentement / absence de consentement / hésitation équivoque ou incertaine ; identifier leurs formes d’expression verbales et non verbales…
→ En s’appuyant sur la législation, définir les termes de « harcèlement », « cyberviolence », « outrages sexistes », « agressions sexuelles », « viol »… et illustrer avec des exemples de comportements.
> En classe de terminale, sur la thématique « Se connaître, vivre et grandir avec son corps »
🤔 De quoi il s’agit ?
→ S’interroger sur les différences entre excitation, sentiment, désir et distinguer différents types de plaisir.
→ Distinguer le morcellement pornographique du corps et l’esthétique érotique.
🧐 Comment l’aborder ?
Avec, par exemple, une co-animation philosophie, français, arts, biologie (SVT, PSE, BPH), SES, langues vivantes, histoire-géographie.
→ Comprendre comment se fabriquent, dans une société d’images et de réseaux qui ne laisse que peu de place à l’imaginaire, des modèles d’excitation (pornographie et violence) et réfléchir à ses effets sur les représentations de ce qu’est ou ce que doit être la sexualité et comprendre ce qui différencie érotisme et la pornographie.
Dans son projet de programme, le CSP souligne que « l’éducation à la vie affective, relationnelle et à la sexualité contribue notamment à la prévention des violences sexistes ou sexuelles » et que « la sexualité (…) participe de la recherche humaine d’une vie accomplie. Elle requiert un degré de maturité et de responsabilité auquel il s’agit de préparer les élèves, très progressivement et en respectant leur rythme de développement ».
Crédit photo : Sex Education-Netflix