L’Intelligence Artificielle : et après ?
Au centre de nombreux débats, l’intelligence artificielle, appelée communément IA, s’est déjà invitée dans notre quotidien à travers nos smartphones et nos ordinateurs, via des logiciels comme Chat GPT ou Midjourney. Mais comment l’IA va-t-elle évoluer ?
Sujette à bien des inquiétudes, l’IA ne cesse de poser des questions et de susciter des craintes. Craintes alimentées depuis des décennies par la culture populaire, en particulier le cinéma ou la littérature. Pour autant, l’IA peut aussi représenter une chance et nous ouvrir de nouvelles perspectives. Alors à quoi s’attendre dans le futur ?
IA : un peu d’histoire
Alan Turing, le célèbre mathématicien et cryptologue britannique, connu pour avoir participé au décryptage des messages envoyés par les forces allemandes à partir de la machine Enigma pendant la Seconde Guerre mondiale, est l’un des premiers à avoir imaginé une machine capable de penser. Cette réflexion l’a amené à concevoir une expérience visant à déterminer à partir de quand une machine deviendrait consciente. Expérience aujourd’hui connue sous le nom de test de Turing.
Dans les années 1980, la puissance de calcul accrue des ordinateurs a permis de considérables avancées dans le domaine. C’est à cette époque que sont apparus les premiers ordinateurs capables de déduire une série de règles à suivre à partir de l’analyse de données. Dans la foulée, les premiers algorithmes en mesure d’apprendre ont émergé, avec notamment, en 1997, le célèbre Deep Blue, qui est principalement réputé pour avoir battu le champion d’échecs Garry Kasparov.
Surtout étudiée aux États-Unis, dans des universités comme celle de Stanford, l’intelligence artificielle a fait une série de bons considérables. Le deep learning (apprentissage profond), notamment porté par le Français Yann Le Cun, est l’un des progrès qui ont encouragé la mise au point de programmes comme Chat GPT.
Au cours de son développement dans les années 2010, l’IA a motivé les chercheurs à relever quatre défis :
- la perception visuelle ;
- la compréhension du langage naturel, qu’il soit écrit ou parlé ;
- l’analyse automatique du langage ;
- la prise de décision en toute autonomie.
Bien sûr, si l’IA est désormais disponible au grand public, via des outils comme Midjourney et Chat GPT, c’est aussi car les progrès accomplis ont motivé les investisseurs à injecter de très importantes sommes d’argent dans la recherche.
L’IA et la culture populaire
La première œuvre d’envergure à avoir exploité le concept d’IA est sans aucune doute le roman 2001 : L’Odyssée de l’espace d’Arthur C. Clarke. Adapté au cinéma par Stanley Kubrick l’année de sa sortie, ce livre met en scène l’équipage d’un vaisseau d’exploration spatiale aux prises avec HAL (our CARL dans le livre), un super ordinateur autonome et finalement malveillant.
Par la suite, l’IA a presque systématiquement revêtu le rôle de l’antagoniste dans les romans d’anticipation et les films de science-fiction. Autre exemple probant : Terminator. Ici, Skynet, un super ordinateur, est devenu capable de penser par lui-même et a décidé de détruire les humains en provoquant une guerre nucléaire. Une fois son objectif accompli, Skynet a lancé la production de cyborgs pour exterminer les derniers survivants et prendre définitivement le pouvoir. Le premier film se déroulant en 1984, quand Skynet envoie dans le passé une machine à l’apparence humaine afin de tuer la mère du futur chef de la résistance.
Au cinéma où l’IA est donc vue comme une menace. Encore en 2023, probablement inspiré par les récents et spectaculaires progrès de l’IA, les scénaristes ne se sont pas privés pour proposer des récits alarmistes, comme avec Mission : Impossible – Dead Reckoning ou Agent Stone. Sans oublier la série Black Mirror qui est devenue la spécialiste des mises en garde contre la technologie et donc l’IA.
Impossible également de ne pas mentionner A.I. Intelligence Artificielle, le film de Steven Spielberg sorti en 2001, dans lequel un petit cyborg rêve de devenir un vrai garçon (comme Pinocchio avant lui) mais se heurte à l’hostilité d’humains peu enclins à laisser les machines entretenir de tels désirs.
Si vous voulez vous offrir un petit cycle IA au cinéma, voici quelques titres forts recommandables : Free Guy, I, Robot, WarGames, Blade Runner, Ex Machina, Wall-E…
Et Matrix ? Lui aussi a bien sûr tiré la sonnette d’alarme en imaginant un monde virtuel créé par une IA afin de réduire en esclavage une humanité prisonnière.
Mais qu’en est-il en réalité ? Quand on pose la question à Chat GPT, en lui demandant si lui et ses « amis » ont pour objectif de nous dominer, le super logiciel se veut rassurant et se présente comme un simple assistant à la disposition de tous. Plus sérieusement, des spécialistes et autres sommités ont déjà tiré la sonnette d’alarme au sujet des progrès effectués par l’IA. Elon Musk en particulier a déclaré que l’IA pouvait représenter un vrai danger et qu’il serait préférable de stopper les recherches pendant au moins 6 mois, le temps de laisser aux humains le temps de s’adapter. Même Sam Altman, le boss d’OpenAI, l’entreprise responsable de ChatGPT, a déclaré être un peu inquiet à l’idée de voir son outil utilisé pour de la désinformation à grande échelle ou des cyber-attaques, soulignant que la société avait vraiment besoin de temps pour s’adapter.
Le futur de l’IA
Pour l’instant, concernant le grand public en tout cas, l’IA est donc capable de fournir des informations, d’écrire des textes, de traduire, de créer des images, des musiques, des voix et des vidéos. Et si l’IA, comme elle le précise elle-même, fait encore des erreurs, les prochaines années, voire les prochains mois, devraient voir émerger des programmes bien plus fiables.
Le futur va probablement voir l’IA s’infiltrer dans toutes les applis, pour rendre ces dernières plus intuitives. De nombreux experts affirment aussi que l’intelligence artificielle va permettre d’accroître la productivité en remplaçant notamment des humains par des machines plus « intelligentes ». Une révolution comparable à la révolution industrielle et à l’arrivée sur les chaînes de production de machines (pour construire des voitures par exemple).
Les chercheurs travaillent également sur ce que l’on appelle le traitement neuromorphique. Le but d’une telle technologie est d’imiter les modes opératoires des cellules dynamiques du cerveau humain. On parle ici d’une intelligence artificielle capable d’apprendre.
Encore au stade embryonnaire, la recherche promet des avancées d’ici 2030 pour ensuite appliquer les découvertes à des domaines comme la fabrication de médicaments, la médecine et l’exploration spatiale. Autant dire que la réalité s’apprête non seulement à rejoindre la fiction mais aussi à la dépasser.
Et, croyez-le ou non, en ce moment, des scientifiques travaillent sur un matériau bio-synthétique capable de fusionner l’IA avec le cerveau humain. De quoi optimiser de manière significative les performances des implants mais aussi de proposer, comme la start-up d’Elon Musk, Neuralink, l’a annoncé, un streaming de données dans le cerveau à travers un simple câble USB.
Pourquoi de telles recherches ? Elon Musk a évoqué la possibilité prochaine d’étendre l’audition humaine ou encore de diffuser de la musique directement dans le cerveau, sans passer par les oreilles. Pour autant, le vrai but de cette technologie est d’utiliser l’IA pour accroître l’intelligence humaine.En toute logique, l’IA va aussi donner lieu à la création de robots humanoïdes bien plus évolués que ceux que l’on connaît aujourd’hui. Après tout, des entreprises comme Xiaomi ont déjà commencé à utiliser ce genre de cyborgs.
Crédit photo : Zhenyu Luo-Unsplash
Vers une AI consciente ?
Cette question, qui aurait paru totalement absurde il y a quelques années seulement, est aujourd’hui plus pertinente. Pour autant, il convient de ne pas s’inquiéter tant le chemin entre une IA super évoluée et une IA pleinement consciente d’elle-même (comme Ultron dans Avengers par exemple) est long. Les grandes entreprises sont conscientes des potentiels risques et débordements que leurs recherches sur l’IA peuvent entraîner et de nombreux gardes-fous ont été posés pour éviter les problèmes.
Néanmoins, tout le monde n’est pas aussi responsable et il est aujourd’hui plutôt réaliste d’imaginer des structures malveillantes capables de concevoir des IA dans le seul but de nuire à autrui, de renverser les marchés financiers ou d’imiter l’humain pour prendre des décisions aux conséquences potentiellement graves.
Dans le futur, l’IA pourrait donc être en mesure de se faire évoluer elle-même et de générer, sans intervention humaine, d’autres super IA. Et si jamais l’IA se dit un jour que l’humain est un obstacle à ses ambitions, comme dans Terminator, rassurons-nous en nous disant qu’elle est encore loin de posséder tous les éléments qui lui seraient utiles pour nous renverser.
IA et éthique
Les progrès fulgurants de ces dernières années concernant l’IA ont posé un certain nombre de questions concernant l’éthique. À Hollywood, scénaristes et acteurs se sont mis en grève pendant de longs mois à cause de l’intention de certains studios d’utiliser l’IA pour écrire des scripts de films et séries et pour exploiter l’image des comédiens pour donner lieu à des œuvres entièrement ou partiellement artificielles (les fameux deep fake).
Accessible, la technologie permettant par exemple de remplacer un visage par un autre, a déjà donné lieu à de nombreux débordements. Et si, parfois, cette technologie s’avère bluffante, comme quand les producteurs de Star Wars ont fait revenir la regrettée Carrie Fisher quelques mois après son décès pour la faire apparaître à l’écran, ou encore quand il s’agit de faire rajeunir un acteur numériquement, là encore, les débordements possibles sont trop nombreux pour ne pas inquiéter.
Les dérives ont donc rappelé l’importance de penser à poser des cadres éthiques. Les entreprises ont compris qu’elles devaient faire preuve de transparence.
En 2017, la CNIL, qui se charge de protéger les données personnelles, de préserver les libertés individuelles et d’accompagner l’innovation, a mené une réflexion afin d’éditer une série de recommandations au sujet de l’IA.
L’IA pose donc de multiples questions. En mesure de nous aider et de nous divertir, elle a tout de même déjà encouragé des débordements. Les réseaux sociaux sont aujourd’hui inondés de créations graphiques approximatives générées automatiquement, ou de chansons inédites de groupes et artistes disparus là encore créées de toutes pièces par une IA. Parfois, il devient difficile de démêler le vrai du faux et au fond, le problème est là.
On peut donc en conclure que si l’IA va continuer à progresser, la société, que ce soit les grandes entreprises ou nous les particuliers, va aussi devoir apprendre à s’en servir. Le principal semble, à ce stade, de rester prudent et ne pas trop se reposer sur l’IA. Encore incertaine, cette dernière fait des erreurs et peut encourager à faire preuve de moins de créativité ou d’initiative. Ce qui est toujours regrettable.
Au contraire, si l’IA permet de gagner du temps en supprimant des tâches fastidieuses pour justement booster la créativité et l’imagination, il sera dans le futur plus rassurant de l’utiliser pour aller dans le sens d’une innovation bienveillante et responsable.
Crédit photo image principale : Julien Tromeur-Unsplash