Platon et La République – partie 1
Repères généraux
Platon est un philosophe de la Grèce antique (IVe siècle av. J.-C.). Il est l’élève et le disciple de Socrate et fait partie des grandes figures de la philosophie. C’est grâce à lui que nous connaissons la pensée de Socrate, qui de son côté n’a rien écrit. Platon le met en scène dans ses écrits, lui et d’autres personnages historiques, sous forme de Dialogues. Chacun de ces dialogues est l’occasion d’aborder un sujet particulier : le beau, le courage, l’amour, la justice, etc.
Grandes idées
La République fait partie des célèbres dialogues de Platon. Écrite au IVe siècle avant notre ère, l’œuvre aborde un large éventail de sujets, de la nature de la justice à la structure de l’État idéal, en passant par l’éducation et la nature humaine. Socrate, en dialoguant avec les autres protagonistes, tente d’y concevoir la Cité idéale.
Deux questions traversent cette oeuvre :
- Qu’est-ce que la justice ?
- Vaut-il mieux se conduire de façon juste ou injuste ?
Pour répondre à ces questions, la méthode de Socrate consiste à former par le dialogue l’organisation d’une cité en s’assurant que chaque groupe la constituant soit à sa place et remplisse la fonction qui lui revient. Ainsi, les gardiens protègent les citoyens qui, eux, assurent la subsistance de l’ensemble, tandis que les philosophes gouvernent. Eh oui, pour Platon, ce sont les philosophes qui doivent gouverner la Cité car, étant les seuls à se pencher sur l’idée même de justice, ils sont les seuls aptes à vraiment la connaître et donc à organiser la cité de façon juste.
Étudier la justice à l’échelle d’une cité permet également de l’étudier à l’échelle de l’âme humaine. La cité est juste lorsque chaque partie assure les fonctions qui lui reviennent, au même titre que l’âme humaine est juste lorsque chaque partie de celle-ci est à sa place. Dans les deux cas, cela est possible lorsque la raison commande.
La République est composée de 10 livres, dont voici la structure générale :
- livre 1 : ouverture et exposition des conceptions traditionnelles de la justice ;
- livres 2 à 4 : définition de la justice ;
- livres 5 à 7 : conditions de réalisation de la cité juste ;
- livres 8 et 9 : l’injustice dans la cité et dans l’individu ;
- livre 10 : récompenses de la justice et mythe final.
Livre I : Conceptions traditionnelles de la justice
Fortune ne fait pas sérénité
À l’occasion d’une fête, Socrate est invité chez Céphale, un sage et riche vieillard. Sont également présents Glaucon et Adimante (les frères de Platon), Nicératos, Polémarque (le fils de Céphale), Lysias, Euthydème, Charmantide, Clitophon et le sophiste Thrasymaque.
La conversation débute entre Socrate et Céphale sur le sujet de la vieillesse. Céphale partage son expérience et affirme que la vieillesse calme les sens et que la sérénité ne peut pas être trouvée à travers les richesses. Pour autant, celles-ci peuvent être un moyen d’éviter la tromperie et le mensonge. “La possession des richesses représente la valeur la plus élevée […] pour l’homme de bien. Ne pas tromper ni mentir, même involontairement, n’avoir aucune dette […] quand le moment est venu de partir là-bas sereinement, à tout cela la possession de richesse pour contribuer pour une large part”.
Faire du mal aux ennemis
Se pose alors la question de la justice, à travers l’interrogation de Socrate : “dirons-nous dès lors qu’il s’agit simplement de dire la vérité et de rendre à chacun ce qu’on en a reçu ?”. Là-dessus, une conversation s’entame avec Polémarque, fils de Céphale. Celui-ci adhère à la définition de Socrate, admettant une exception dans le cas où la personne à qui l’on doit rendre quelque chose est devenue folle (imaginez devoir rendre une arme à quelqu’un qui a perdu la tête).
Pour s’assurer que la définition soit juste, Polémarque propose de l’étendre en affirmant qu’il faut faire du bien à ses amis et du mal aux ennemis. Pour autant, oppose Socrate, il est possible de confondre ses amis et ses ennemis puisqu’il est possible d’être injuste en paraissant juste et inversement. Le juste peut donc, sans le vouloir, faire du mal à ses amis et du bien à ses ennemis.
L’injustice profitable
Thrasymaque rejoint alors la conversation et affirme que la justice n’est rien d’autre que l’intérêt du plus fort. “Tout gouvernement institue les lois selon son intérêt propre, la démocratie institue des lois démocratiques, la tyrannie, des lois tyranniques, et ainsi pour les autres régimes politiques. Une fois les lois instituées, ils proclament juste pour les gouvernés ce qui de fait correspond à leur propre intérêt, et si quelqu’un les transgresse, ils le punissent comme violateur de la loi et auteur d’une injustice”.
Socrate avance quant à lui que les gouvernants cherchent à préserver l’avantage des gouvernés, au même titre que le médecin le fait pour le malade. Mais Thrasymaque choisit l’exemple du berger pour affirmer le contraire : celui-ci ne recherche pas l’avantage des “gouvernés” (les moutons) mais bien son avantage propre puisqu’il élève ses bêtes pour en tirer profit. Pour l’orateur, la pratique de l’injustice est plus profitable que la pratique de la justice. En affaires, par exemple, le juste et souvent victime de l’injuste.
À ce titre, agir de façon juste relèverait de la stupidité alors qu’agir injustement témoignerait de prudence. La réflexion de Socrate amène pourtant à admettre que le juste est sage et bon alors que l’injuste est ignorant et méchant. Plus important encore, la vie du juste est préférable à celle de l’injuste. Celui qui vit dans le bien est heureux, tandis que celui qui vit dans le mal est malheureux.
Dans la prochaine partie de cet article, nous nous intéresserons aux livres 2 à 7 de la République et nous nous pencherons sur la définition de la justice et sur les conditions de réalisation de la cité juste.
Ce qu’il faut retenir
La République est un ouvrage de philosophie politique qui interroge la notion de justice et dans lequel Socrate, qui mène le dialogue, tente d’imaginer les fondements d’une Cité idéale.
Le terme à bien comprendre
La maïeutique : l’art d’accoucher des idées
Pour Socrate, chacun porte en soi la connaissance. Par le biais de l’interrogation, il aide son interlocuteur à prendre conscience de ce qu’il sait implicitement. “Mon art de maïeutique a les mêmes attributions générales que celui des sages-femmes. La différence est […] que [ce sont] les âmes qu’il surveille en leur travail d’enfantement, non point les corps”, explique Socrate dans le Théétète. Dans la maïeutique réside donc l’idée d’un accouchement de l’esprit.
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