Que contient le permafrost ?
La crise sanitaire relative à l’épidémie de Covid-19 a encouragé de nombreuses personnes à évoquer le permafrost. Mais de quoi s’agit-il et pourquoi en a t-on parlé pendant la pandémie ?
Terme utilisé pour désigner un sol dont la température se maintient pendant au moins deux années consécutives en dessous de 0 degrés Celsius, le permafrost inquiète. Surtout à l’heure du changement climatique. Vivre au Lycée a essayé de comprendre en quoi sa disparition pourrait nous impacter.
Qu’est-ce que le permafrost ?
Tout d’abord, une petite précision. « Permafrost » est un terme anglais. En France, on dit plus communément « pergélisol ». Le permafrost représente actuellement environ 20% de la surface terrestre, ou 1/5ème des territoires non immergés. Et bien sûr, vu qu’il désigne des terres gelées, il concerne les hautes latitudes et les hautes altitudes. Sa répartition est la suivante :
- 90% du Groenland ;
- 80% de l’Alaska ;
- 50% du Canada et de la Russie.
Le permafrost se compose de trois couches : une couche active d’environ 2 à 3 mètres, qui dégèle la plupart du temps en été, la seconde, située à une profondeur comprise en 10 et 15 mètres et la troisième, qui peut atteindre plusieurs centaines de mètres. Cette dernière couche ne connaît aucune variation de température et est donc congelée en permanence.
Le permafrost contient 1 500 milliards de tonnes de gaz à effet de serre, soit deux fois plus que dans l’atmosphère. Et c’est justement l’une des raisons pour lesquelles le permafrost fait l’objet de tant d’inquiétudes.
Le permafrost, une énorme réserve de méthane
Ces trente dernières années, les températures en Sibérie ont augmenté de 2 à 3 degrés. Cette hausse a déjà entraîné des conséquences graves sur une zone plus étendue que les surfaces combinées de la France et l’Allemagne. Dans ces endroits, le permafrost est donc en train de fondre pour la première fois depuis la fin de l’ère glaciaire, il y a quelque 11 000 ans.
Pour les populations installées dans ces régions, qui ont donc exploité le permafrost, cette chute des températures a provoqué plusieurs affaissements de terrain, la détérioration de routes ou encore la rupture d’oléoducs. Et si le gaz contenu dans les sous-sols gelés venait à être libéré ? Ce serait bien sûr très préoccupant.
En effet, le méthane est ce que l’on appelle un gaz à effet de serre. Celui-ci est très actif et est donc l’un des principaux responsables du changement climatique. Le problème est donc très préoccupant car si le réchauffement climatique entraîne la fonte du permafrost et la libération du méthane, celui-ci ne fera qu’accélérer la hausse des températures. Un véritable cercle vicieux !
Le plus inquiétant est que, selon les chercheurs, plus de la moitié du permafrost pourrait fondre d’ici 2050. En 2100, si le phénomène se poursuit, 90% des terres gelées seraient concernées par la fonte.
Alors que faire ? Concernant le méthane pour l’instant emprisonné dans la glace du permafrost, plusieurs travaux sont actuellement menés pour essayer de l’extraire afin de le transformer en énergie. Si tout se passe comme prévu, il serait possible de tirer parti de cette bombe à retardement. Malheureusement, dans le permafrost, il n’y a pas que du gaz. Il y a aussi des virus très anciens dont nous ne savons absolument rien. Et c’est bien pour cela que certains experts ont parlé du permafrost pendant la pandémie de Covid-19.
Les virus du permafrost
C’est un fait, le permafrost contient de nombreux virus très anciens, pour l’instant en sommeil, qui pourraient donc se réveiller en cas de dégel. À titre d’exemple, l’équipe du professeur Jean-Michel Claverie a mis à jour deux virus vieux de 30 000 ans en 2014. Des virus qu’ils sont parvenus à « réanimer ». Heureusement, ces derniers étaient inoffensifs. Mais on le sait, ce n’est pas le cas de tous les virus du permafrost et les plus pessimistes n’hésitent pas à affirmer que si le Covid-19 nous a paru redoutable, les virus du permafrost pourraient se montrer beaucoup plus dévastateurs.
Cela concerne de plus non seulement les humains mais aussi les plantes et les animaux. Les spécialistes ont de plus affirmé que les virus les plus dangereux du permafrost se situaient à plusieurs mètres de profondeur.
Le plus inquiétant, c’est qu’on peut déjà aujourd’hui voir les conséquences du dégel du permafrost concernant les virus. En 2016, un enfant est décédé de l’anthrax en Russie, alors que cette maladie avait officiellement disparu depuis 70 ans. Les scientifiques qui ont enquêté ont affirmé que la contamination avait probablement eu lieu suite au dégel du cadavre d’un renne mort de l’anthrax il y a plusieurs décennies. Inutile de préciser qu’il n’existe actuellement aucun moyen de savoir si des vaccins et des traitements existent pour les virus potentiellement prisonniers du permafrost. Probablement pas d’ailleurs…
La variole inquiète particulièrement les chercheurs. En effet, plusieurs zones du permafrost étaient autrefois peuplées par des humains qui ont succombé à cette maladie. Il est donc raisonnable de penser que plusieurs corps infectés se trouvent aujourd’hui dans le permafrost et que le réchauffement climatique pourrait très bien les mettre à jour, réactivant un virus susceptible à son tour de déclencher une épidémie.
Doit-on pour autant avoir peur ?
À notre niveau, difficile de lutter contre le dégel du permafrost. On peut certes observer des gestes éco-responsables au quotidien, comme trier les déchets et ne pas trop monter le chauffage pendant l’hiver mais c’est guère tout. Il convient pourtant de relativiser. Rien ne sert de céder à la panique qui n’a jamais rien de bien constructif.
Les chercheurs sont les premiers à affirmer que le fait que le permafrost se trouve dans des régions du monde très peu habitées nous préserve quelque peu des virus qui pourraient être mis à jour par le dégel. Ils précisent aussi que le réchauffement climatique, en cela qu’il entraînera forcément des migrations de populations vers de nouvelles zones habitables, reste un facteur quelque peu préoccupant.
Espérons donc que les appels des scientifiques soient entendus par les grandes puissances afin que ces dernières prennent de véritables décisions à même de changer la donne.
Crédit photo : Roman Purtov