Shaun Hamill : un auteur à suivre
Né à Arlington dans l’État du Texas aux États-Unis, Shaun Hamill a commencé à écrire dès le plus jeune âge. Fort de plusieurs nouvelles publiées dans Cave Magazine et Spilt Infinitive, il a débarqué avec Une Cosmologie de monstres, son premier roman, qui va bientôt faire l’objet d’une adaptation en série TV.
Paru aux éditions Albin Michel chez nous, ce roman, qui fait tout autant référence à H.P. Lovecraft qu’à John Irving, a fait forte impression. Et c’est au détour d’une rencontre sur Instagram que Shaun Hamill a accepté de répondre à nos questions…
Quel genre d’élève étiez-vous au lycée ?
J’étais du genre modeste. Je n’avais pas d’excellentes notes mais je savais déjà que je voulais devenir écrivain. Alors j’ai beaucoup écrit. J’ai eu la chance d’avoir des amis proches qui sont aujourd’hui toujours à mes côtés, donc je me suis amusé plus que la plupart des gens au lycée. Notre groupe n’était pas populaire mais cela nous était égal car nous étions trop occupés à nous amuser entre nous.
Stephen King a affirmé à propos d’Une Cosmologie de monstres qu’il évoquait le style de John Irving, dans un registre horrifique. Difficile d’imaginer un meilleur compliment. Et en effet, je trouve que votre roman, en particulier quand il disserte sur la famille, rappelle des romans de John Irving comme L’Hôtel New Hampshire, avec une mélancolie persistante qui, quant à elle, évoque Une prière pour Owen. Qu’en pensez-vous ?
Je suis d’accord, c’est le plus beau compliment qu’on puisse avoir. Je suis un grand admirateur de l’œuvre de John Irving. Quand je parlais de l’histoire d’Une Cosmologie de monstres à mes amis, j’en parlais comme d’une sorte d’Hôtel New Hampshire, mais avec des monstres. Il est ainsi très gratifiant que Stephen King ait relevé cette influence.
Une Cosmologie de monstres est votre premier roman. Comment vous est venue une telle idée ?
Comme je l’ai dit, je suis un grand fan de John Irving. Quand j’avais la vingtaine, j’ai voulu écrire une grande saga familiale dans le style de L’Hôtel New Hampshire. Je savais que je voulais qu’il s’agisse d’une affaire de famille et je savais que ce serait raconté par le plus jeune des enfants, un garçon dans une maison de femmes, qui n’a jamais connu son père. Mais c’est bien tout ce que je savais alors. Et ce fut le cas pendant longtemps. Et puis au lycée, j’ai écrit une nouvelle au sujet d’un couple marié qui vient à se séparer dans une attraction de maison hantée où travaille le mari. L’histoire ne fonctionnait pas vraiment mais le décor, une attraction de maison hantée qui fait office de cadre pour un drame familial, m’est resté à l’esprit. Un jour, alors que je promenais mon chien, deux idées me sont venues à l’esprit. Je savais que l’affaire de famille devait être une maison hantée du genre de celle que l’on trouve dans les parcs d’attractions. Par la suite, je me suis mis au travail sans m’arrêter jusqu’à ce que j’obtienne le premier brouillon.
Votre roman est traversé de passages écrits à la troisième personne qui contribuent à instaurer une rythmique mais aussi à prendre du recul par rapport aux personnages. Comment une telle idée vous est venue ?
L’idée des passages à la troisième personne s’est imposée par nécessité. Si certains romanciers sont très doués pour couvrir de longues périodes, j’ai toujours trouvé que j’étais meilleur en ce qui concerne l’immédiateté. J’avais donc besoin d’un moyen de relier les différentes sections du livre, qui se déroule donc sur plusieurs années. Ces passages donnent également au lecteur des informations sur les personnages que seul un narrateur extérieur peut connaître. J’ai ainsi écrit ces passages lyriques, à la troisième personne, pour autoriser le lecteur à entrer d’une certaine façon dans la tête des personnages. Je suis vraiment satisfait du résultat. Je pense d’ailleurs que ces passages figurent parmi les meilleurs du livre.
Vous mentionnez plusieurs fois Lovecraft mais jamais vous ne cherchez à l’imiter. Ceci étant dit, n’avez-vous pas eu peur que vos lecteurs fassent la comparaison ?
Honnêtement, j’ai écrit ce livre par instinct. J’ai exploité Lovecraft de la façon dont je l’ai fait parce que cela m’a paru pertinent sur le moment. Je ne me suis inquiété des éventuelles comparaisons que peu de temps avant la publication, mais le livre n’était déjà plus entre mes mains.
Vous avez travaillé dans une librairie, où, ainsi que vous le mentionnez à la fin du roman, vous avez écrit vos premières nouvelles. À votre avis, est-il nécessaire d’aimer lire pour écrire ?
Oui absolument. Si vous n’aimez pas lire, pourquoi voudriez-vous écrire ?
Quel conseil donneriez-vous à un lycéen qui aimerait devenir écrivain ?
Lisez autant que vous le pouvez et commencez à écrire. J’ai débuté l’écriture quand j’avais 10 ans et je n’ai publié mon premier livre qu’à 36 ans. Parfois, cela prend du temps pour devenir bon ou trouver l’opportunité d’être publié. Plus tôt vous commencerez et meilleures seront vos chances de succès.
Alors que le genre horreur est souvent associé à Stephen King, votre livre se distingue de son style. Quelles sont vos plus grandes influences ?
Ma plus grande influence est probablement John Irving. Mais il y a aussi Lorrie Moore et Thomas Ligotti. Je considère Stephen King comme une grande influence également mais peut-être que cela ne se voit pas dans mon livre en effet.
Quelles sont vos méthodes de travail ? Prenez-vous par exemple beaucoup de notes ?
Ma méthode a changé au fil des années. J’ai écrit Une Cosmologie de monstres par instinct mais le livre que j’écris en ce moment m’a encouragé à tout d’abord dresser un aperçu complet de l’histoire. Il n’existe pas une méthode qui semble particulièrement fonctionner pour moi. Je dois à chaque roman apprendre comment l’écrire, comme si c’était mon premier.
Une Cosmologie de monstres va être adapté à la télévision. Pouvez-vous nous en parler ?
Malheureusement, je ne peux pas dire grand chose à ce sujet pour le moment si ce n’est que l’équipe qui travaille dessus a une vision très cool du roman. Cela devrait déboucher sur une excellente série. Je suis en tout cas emballé à l’idée de voir ce qu’ils vont proposer.
Votre roman traite de monstres cachés dans l’ombre mais aussi de monstres bel et bien humains. Qu’est-ce qui vous fait vraiment peur ?
Je pense que le « monstre humain » est de loin plus effrayant que toutes les créatures du registre fantastique. C’est pourquoi je préfère lire des romans d’horreur surnaturels. Les récits trop réalistes sont trop effrayants.
Et pour finir, pouvez-vous choisir…
- Un livre : je lis en ce moment Black Sheep de Rachel Harrison (non publié à ce jour en France, ndr.) et c’est excellent !
- Un album : j’ai beaucoup écouté l’album éponyme de Say Anything sorti en 2009.
- Une chanson : True Love de Hovvdy
- Une série TV : The Bear est géniale (sur Disney +, ndr).
Crédit photo : Albin Michel